On y croyait si fort

On y croyait si fort

Il ne pouvait en être autrement.
L’épreuve fut si rude, si brutale, si inimaginable, d’ailleurs pourquoi utiliser le passé alors que tout est encore au présent et si présent…
On y croyait si fort, sans le moindre doute possible telle une belle évidence, comme celle du jour et de la nuit, du soleil que se lève chaque matin.

On y croyait si fort qu’il ne pouvait en être autrement.

Nous n’avions pas vécu ce décompte insupportable chaque soir pour rien.
Les larmes versées de tous ceux qui ont vu partir, impuissants, leurs proches ne pouvaient tomber dans l’oubli, pire, dans une omission morbide et indécente.

Nous avions en tête comme le refrain d’une chanson qui revient en boucle et que l’on aime bien:
« rien ne sera plus comme avant »
« nous serons conscients, lucides et responsables »
« la liberté retrouvée rimera à jamais avec solidarité et entraide »
« nous saurons nous émerveiller d’un rayon de soleil, d’une fleur, du moindre souffle de vie »
« le vivre ensemble raisonnera comme un acquis car nous en avons déjà suffisamment payé lourdement le prix »

On y croyait si fort…
Mais le nombre de tombes, le décompte quotidien des morts, la liberté confinée n’a pas suffit.

Le brouhaha de notre quotidien passé est revenu plus rapidement qu’il ne faut pour le dire.
Notre mémoire s’est drapée d’une amnésie profonde en quelques secondes.
Le civisme est tombé à terre, jeté dans les caniveaux au sens propre comme au sens figuré.

L’intolérance de la différence de peau, de religion, d’être, tout simplement, est venue à nouveau s’installée à la une. Les rues bondées de cris demandant le droit de vivre libre pour tous et dignement dans le respect raisonnent à nouveau comme une chanson triste que nous connaissons par coeur.

On y croyait si fort à ce monde d’après, plus beau, plus compréhensif.

24 heures ont suffit pour balayer l’espoir.

Pourtant on y croyait si fort … Mais apparemment pas assez puisque aujourd’hui nous sommes genoux à terre.

Des questions ? Pas de questions ? Non juste une immense tristesse.